Télérama :
« Les Hauts Parleurs et alors ? ».Inutile de douter de cette étrange réalité née d’un rêve de quelques-uns uns : ces artistes parlent haut et ensemble d’une seule voix, mais d’une voix polyphonique. Il faut les entendre et les voir… ça déménage ! Le ton, d’abord : à quarante, forcément, il y a des bémols et des dièses, des ténors et des sopranos ! Quel cœur dans ce chœur conteur ! 4 fois par an ce collectif improbable qui fêtera ses 6 ans en 2012 se réunit, discute, révèle, réveille et ouvre des pistes de travail, de recherche, ose des expériences, s’engage, se porte et se supporte. Il faut les avoir vus, 23 sur scène, pour un spectacle unique, devant une salle pleine, curieuse, médusée, amusée. Une ovation méritée pour cette troupe éphémère qui; lire la suite p 66, page Culture
Claire Truche , metteuse en scène
« bon, là, je vous le dis : je veux que ce soit court, bref, incisif ; pas dans le pathos, pas dans le lourd ; rien de long, c’est clair ? Oui, le spectacle doit dure 1h15, vous être 23 ! le compte est bon. Dites-vous que le public ne s’intéresse pas à l’histoire, lui, il s’intéresse aux sensations, aux images, aux sons et aux couleurs. Alors, côté cour, côté jardin, ça bouge, ça chante, il faut qu’il se passe toujours quelque chose, quelque part. Je veux du dynamisme, du geste, de l’incisif… des questions ? »
Corneille :
« Ils partirent une dizaine mais par un prompt renfort
Se trouvèrent une trentaine dans un groupe plus fort.
Tant à se voir heureux d’être ensemble
Ils savent déjà que le conte les rassemble.
Conteurs et conteuses trouvent au Polaris un terrain fertile
Car tous brûlent d’impatience de se montrer utiles
Aux uns comme aux autres, au conte et à son renouveau,
Et pour le prouver se trouvent un plateau.
Ils s’y installent sans peur, sans cris et sans égo.
Ils jettent l’encre de la parole comme on jette l’ancre d’un cargo.
Ils s’amusent, se stimulent, et s’ils doutent d’eux-mêmes, ne doutent pas des autres,
Devant cet écueil ne commettent aucune faute.
Ils savent qu’on les attend, une salle pleine et curieuse
Prête à saluer et encourager cette entreprise audacieuse :
Un spectacle unique fait par 23 artistes conteurs, chanteurs et musiciens
Qui pour le plaisir de tenter une aventure commune se sont trouvés enfin. »
Feydeau
- L’un : Non ! Vous plaisantez, j’espère
- L’autre : Pardon ?
- L’un : Je dis : « vous plaisantez, j’espère ! »
- L’autre : Mais, monsieur, je n’ai rien dit
- L’un : Justement, Monsieur, vous plaisantez, j’espère !
- L’autre : Et pourquoi donc, s’il vous plaît, je plaisanterais quand justement je ne dis rien
- L’un : Mais Monsieur, voyons, rester muet devant tant d’originalité…
- L’autre : « Originalité, originalité », que n’ai-je dit qui me vaut tant de grossièreté ?
- L’un : « originalité » n’est pas grossier, monsieur ; et pour satisfaire votre curiosité qui met beaucoup de temps à se réveiller laissez-moi vous en glisser deux mots
- L’autre : faites vite mon ami, j’attends une dame qui..
- L’un : elle attendra ; les femmes sont là pour ça ! Donc, je vous disais que j’avais eu vent d’un collectif « les Hauts Parleurs et alors », sorte de compagnie artistique fondée essentiellement autour du conte qui se réunit 4 fois par an et depuis 6 ans
- L’autre : je ne vois pas là matière à m’apostropher de cette sorte et à me tirer d’un rêve enchanteur que je faisais au sujet de cette dame qui
- L’un : mais laissez donc cette dame tranquille, elles aiment qu’on les fasse attendre, elles s’impatientent et ainsi énervées, nous tombent toutes crues dans les bras avant qu’on ait retiré nos gants. Laissez-moi vous parler du spectacle de ces conteurs au verbe haut que j’ai vu jouer hier au Polaris à Corbas et je n’en suis pas peu fier
- L’autre : et bien j’irai demain !
- L’un : mais non, c’est impossible : ils ont joué une seule fois, « Tutti frutti et peaux d’banane » ! Ah quel ton, quel rythme, quelle mise en scène, toujours à voir quelque chose… tenez exactement comme la publicité pour le grand magasin boulevard Haussmann.. comment est-ce déjà ?
- L’autre « il se passe toujours quelque chose » !
- L’un : voilà, exactement : 23 artistes sur scène, une metteuse en scène exemplaire, une directrice de salle courageuse, et à la fin une salade de fruits !
- L’autre : c’est donc que la culture nourrit son homme ? ah, ah, ah.. je suis drôle.. Bon que fait-elle la bougresse ?
- L’un : non monsieur, vous n’êtes pas drôle car un spectacle qui tient la promesse de son titre ne prête pas à rire, Monsieur, mais pousse à dire « Bravo les artistes ».
Côté cour, la porte s’ouvre, une femme essoufflée, chapeauté, gantée, se précipite et dit en tendant les bras vers l’autre « ah, mon ami, excusez-moi pour ce retard, quelle salade ! »